82
MÉMOIRES D’UN DADA BESOGNEUX
lisait un cas encore plus exceptionnel dans
notre pays : car il n’est pas absolument rare,
en France, de voir un homme, parti de
rien, nu à sa naissance comme un petit
saint Jean et pauvre comme Job, devenir
un des personnages éminents de la grande
industrie, un entrepreneur d’affaires opu
lent, enfin un multimillionnaire. Cela s’est
vu, cela se voit, cela se verra encore. Mais
il est tout à fait hors du commun et pres
que inouï qu’un homme qui a hérité de
peu de chose ait fait plus que vivre sur ce
peu. Les gens qui, chez nous, devien
nent très riches, sont ceux qui ont eu le
bonheur d’être déjà solidement riches
à leur naissance, ou de n’avoir pas le
sou.
Tel est pourtant le phénomène invrai
semblable qu’avait montré M. Pinchon.
Ayant hérité d’une fortune moyenne, et
qui suffisait à ses besoins, il avait pour
tant travaillé, agi, combiné, comme s’il
eût dû le lendemain ne pas trouver de quoi