et la rectification de l'enthousiasme
par Léon CHENOY
Ce qu’on a surtout approfondi en
Stendhal, c’est l'égotiste, c’est aussi le
psychologue. — Mais les fortes person
nalités offrent, en plus de leurs aspects
généraux, les premiers accessibles, des
faces moins immédiatement en lumière
et qui sont toutefois d’une signification
supérieure.
Les étudier permet de joindre, aux
grands portraits que nous aimons de
nos maîtres, quelques détails curieux ;
des traits de caractère suggestifs ; des
attitudes laissées dans l’ombre ou qui,
indiquées seulement en hâte, n’occupent
pas dans une silhouette littéraire le
relief qui semble leur revenir.
Parmi ces côtés séduisants de
Stendhal, je note l’enthousiasme, dont
il est si curieux de suivre en lui révo
lution, depuis Grenoble et Paris jusqu’à
Civita-Vecchia.
N aurait-il eu que de l’enthousiasme,
sans plus, cela valait qu’on en parlât.
C’est lorsqu’il est naturel, une vertu rare
et dont il faut souligner la présence.
Mais celui de Stendhal est particuliè
rement précieux, étant tout personnel.
Il me paraît aussi plus à même de diri
ger notre conscience actuelle, que
l’imaginative exaltation romantique
dont il fût contemporain — avec tant
de différences.
I.
La “ Vie de Henri Brulard “, le
“Journal" et les “Souvenirs d’Egotisme"
nous laissent étudier comment progressa
ce don d’exaltation que Stendhal possé
dait avec originalité. On l'y voit se
fortifier en se concentrant ; s’intensifier
en se couvrant de froideur défensive.
Entre l’époque, à Grenoble, ou Beyle
se passionne pour “l’espagnolisme"
pour les sentiments nobles, élevés,
chevaleresques et celle où il écrit ce
livre amer et fort, qui l’est déjà par son
titre : “Le Rouge et le Noir", que
d’étapes il a parcourues ! Par quelles
curieuses expériences il a passé, dans ce
monde d’Empire et de Restauration....
Il faut reprendre avec lui ce chemin,
et approfondir, à l’unique point de vue
d’une formation d’enthousiasme, les
réflexions psychologiques, les promesses
qu’il se fait, les mille recettes qu’il note
pour sa conduite, pour affermir son
attitude et la maîtrise de ses actes.
Et, pour savourer pleinement cette
nature qui dérouta d’excellents esprits
et les fit s’égarer, il faut d'abord voir
en Stendhal l’homme du Dauphiné, et
ses caractéristiques régionales, dont il
participe fort. Il a de ses compatriotes,
la “manière de sentir à soi, vive et