Volltext: 5(1923), Nov.-Déc. = Nr. 34 (34)

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FAITES YOS JEUX 
tement en elle ce mécanisme que rien n’arrivait à forcer. Il était naturel 
que des symptômes à ce point irréels éveillassent en moi des doutes sur 
leur véracité. J’en fis part à T. B. qui pouvait désormais mettre mon 
attention sur le compte d’une observation scientifique. 
Mais mon intérêt pour Mania diminuait aussi, elle s’en aperçut 
et fit des efforts pour le captiver; elle se réfugiait plus souvent dans les 
régions somnifères, ses visions se peuplaient de symboles mystérieux et 
devenaient de plus en plus tourbillonnantes. Cela me donna une sorte de 
certitude qu’une part de sa maladie était feinte et qu’elle mettait l’autre 
au service de sa coquetterie. Mes jugements étaient trop positifs et se 
croyaient, à cause de leur féroce jeunesse, souverains et implacables, car 
aussi bien j’aurais pu attribuer l’aggravation de sa maladie à la peur de 
me perdre ou à quelque autre sentiment étranger à ma connaissance. 
Mais croyant qu’elle aimait T. B. et qu’elle désirait une rupture sensa 
tionnelle entre lui et moi pour en tirer des plaisirs plus savoureux, je 
m’éloignai définitivement d’elle. 
Rien, mais abolument rien ne l’encourageait à parfaire le plan insensé 
qu’elle devait, six mois plus tard, mettre si brusquement à exécution. 
Ma mère fut bonne pour elle, ma sœur lui montrait de l’affection. En 
quoi cela engageait-il ma responsabilité sentimentale? Jamais je n’eus 
envers elle un geste pouvant conclure à des assonances d’intimité. Jamais 
mon regard ne fut plus véhément que d’habitude, il s’adoucissait au 
contraire à l’attouchement du sien, était plein de docilité, de prévenante 
compassion. 
Rentré en ville, des événements assez obscurs me séparèrent de mes 
parents. Je passai quelques mois embrouillés, des nuits d’oubli sans pré 
caution, je vérifiais avec spontanéité les différents cris de mon sang. Je 
ne revis point Mania. Son souvenir, si petit fût-il, disparut dans l’exas 
pération de mes jeux. On eût dit qu’à chaque minute j’aurais pu clore ma 
vie, sans regret ni testament, tellement elle était nulle, tellement chaque
	        
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