ANDRÉ SALMON
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le dimanche et à la bergamote, le jour de la Fête Nationale. Cette eau
sera fournie par le puits artésien de la place Berthe-Morisot (après ces
mots la copie revient à l’honnête dactylographie).
Il faudra que la piscine arrive à payer ses frais.
En fine anglaise, à /’encre violette saupoudrée d'argent :
A ce sujet, qu’on se rassure, Messieurs de la Ville. Si la piscine ne
sera point, à proprement parler, mixte, l’entrée en sera libre. Je
ferai adopter le système en vigueur dans les bals populaires des Gravil-
liers ou de la Mouffetard. A la valse ! A la vase ! chante la patronne en
fleur, tapant sur sa sacoche pour en faire tinter les sous comme les
menues cymbales d’un tambourin. Au bain! Au bain! crieront nos
moniteurs en caleçons aux armes de la Ville de Paris avec la devise.
Parce qu’il ne faut négliger aucune occasion de travailler à l’éducation
du peuple, ces maîtres baigneurs, d’ores et déjà engagés, appointés et
commissionnés, et au nombre de trois, répondront aux noms de maîtres
classiques : Corneille, Racine, Boileau. Le bain sera-t-il compté quatre
sous, dix sous, treize sous? Eh qu’importe! Et voici la merveille : pour
le sexe joli, monsieur et cher interlocuteur, et particulièrement pour les
vierges, le bain municipal de notre Piscine Jean Valjean sera gratuit et
obligatoire. Source de bénéfices. Suivez mon raisonnement. Vêtues de
leurs parures des dimanches, le plus coquettement et le plus complète
ment vêtues que faire se peut et qu’y autorise le goût du jour, chapeau
tées si possible et bottées haut de préférence, maquillées, j’y souscris,
voire j’y encourage, au signal connu, le coup de sifflet strident du
quartier-maître baigneur, le citoyen Corneille, ses auxiliaires Racine et
Boileau se précipitent sur nos pimpantes citoyennes vierges et alors les
poussent, les basculent, leur donnent d’adroits et inoffensifs crocs-en-
jambe, bref, de bonne entente et à qui mieux mieux, avec discipline et
bonne humeur emplissent d’elles la coupe marmoréenne de la Piscine
Jean Valjean, où les voici qui s’y épanouissent, c’est le mot, de telle
sorte que je ne puis mieux comparer le jeu qu’à cette fantaisie chère aux