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MARCEL SAUVAGE
LE ROMAN.
LE SONGE, — par Henri de Æontherlant, — (Bernard Grasset, éd.)
Quand un écrivain meurt, presque toujours c'est alors que son
œuvre semble naître. Seulement alors elle apparaît dans sa plénitude
et détermine aussitôt des courants intellectuels. Ainsi pour Marcel
Proust dont la leçon transparaît ici sous l’étoffe des phrases.
Une autre lumière, un autre appui : Maurice Barrés.
Voici posé, avec le plus lointain souvenir de Stendhal, le trépied
spirituel sur lequel va lentement pivoter (en 3^5 pages) un héros peu
sympathique, le jeune Alban de Bricoule, — création originale, créature
artificielle qui aime à montrer, au gré de M. Henri de Montherlant,
la méchante âme ardente, tour à tour fumeuse ou claire dont elle est
vêtue.
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* *
Alban de Bricoule a “la folie des âmes,” c’est un “toucheur
d’âmes ” qui connaît depuis peu son histoire ancienne, la romaine en
particulier et qui, d’abord, ne jure que par Alcibiade, César et Catilina.
Ni plus ni moins. Ce naïf collégien, tout en nerfs et en contradictions,
mauvais et prétentieux, amoureux de son égoïsme qu’il nomme disci
pline et qu’il épluche avec dilection à chaque minute, Narcisse incliné
sur le miroir de son inconscient, — est, paraît-il, catholique, catholi
que avec le dégoût de la chair. « Son orgueil n'est que pour les hommes,
son humilité est pour Dieu. »