LES ARTS
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LES ARTS.
GEORGES BRAQUE (A propos du Salon (f Automne)
Il y a peu de monde devant les toiles de Georges Braque. Le public
s'arrête à d'autres devantures, il regarde les beaux jouets, les blocs
de constructions, les poupées articulées, les automates, car le Salon
d'Automne, aux approches de Noël, est un grand boulevard éclairé,
plein de tentes et de cabanes. Qui pense à lever les yeux pour se rap
peler, ne fût-ce qu'un instant, la vraie couleur du feuillage ?
Enfin, respirons ! De la bousculade amusante ne songeons à contes
ter ni l’opportunité, ni le charme. Tendres œillades et coups de poing
nous laissent un souvenir agréable. Les monômes, sous l’œil des cri
tiques, agents de police, évoluaient avec assez d’ordre et d’indiscipline
pour que les deux traditions, l'anarchique et l'autre, fussent momenta
nément satisfaites. Mais un peu en dehors des voies parcourues, retrou
vons le calme, notre liberté d’allure et Georges Braque.
Vain espoir, celui de rendre intelligible une émotion que le musicien
peut-être exprimerait par un pianissimo très lent, mieux par une pause
avec point d’orgue. L’effet de ce blanc pourquoi nous préférons au
poème, la demi-page vierge où vient frapper son écho. Cependant,
puisqu’il n’est pas d’usage de faire suivre un nom vénéré de longues
parenthèses vides où chacun pourrait insérer mentalement sa couleur
favorite, sa fleur, sa ville, le thème d'une mélodie, entourons Braque
d’une zone neutre, d’une marge pareille à celle que réservent aux
approches de ses tableaux les cadres teintés de lait, rejetés par eux,
comme d'un lac vers ses rives l'écume, les rameaux argentés du saule.