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DRIEU LA ROCHELLE
qu’avec les autres. Notre plus grand ennemi est en nous-mêmes. Il faut
que nous nous tournions vers la mort qui est entrée en nous.
Mais en nous enfonçant ainsi en nous-mêmes nous atteignons un
mal, un péril qui est plus profond que nous-mêmes, qui est humain; nous
mettons la main sur ce qui est tragique pour tous les hommes d’aujour
d’hui.
Ce qui dépasse une patrie, c’est la vitalité des meilleurs des hommes
qu’elle a mise au jour. Ils sont plus forts que les événements, et alors
qu’elle fléchit, leur esprit étincelle encore au front de leur mère. Ils
peuvent toujours, dans un acte surprenant, ressaisir ou résumer tout l’effort
de leur race.
Les jeunes Français doivent être de tels stoïques.
A leur France, dont un excès de civilisation cause le fatal rétrécis
sement psychologique, le tarissement de la bonne volonté créatrice, à leur
France qu’un effet de l’optique mondiale fait petite entre les nouvelles
nébuleuses, ils trouveront deux moyens pour lui redonner sa pleine mesure,
pleine mesure.
D’une part elle renonce à un éclat solitaire et s’amalgame aux
constellations qui se brassent en Europe, qui sont des promesses
d’ordre dans le chaos et qui lui prodiguent la force mise en commun.
D’autre part, elle se recueille dans une méditation sévère sur le sens de
l’effort humain, dissipe la tentation éphémère d’une prédominance par
les armes et les outils, maintient sa tradition spirituelle, la renforce de
toutes les tendances libératrices qui se font jour en Orient et ailleurs, enfin
tourne sa langue dans sa bouche pour y former une parole humaine que
les événements rendent bientôt nécessaire et décisive.
C’est ainsi que les jeunes Français, brûlés par les fournaises de la