Full text: Numéro spécial (1er Octobre 1919)

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LE CRAPOUILLOT 
mis pourtant d’apprendre que l’infortunée victime était 
enceinte. 
Sans tenir compte de cette situation, son agresseur l’a 
frappée avec une féro 
cité inimaginable. Le 
bandit surprit vrai 
semblablement sa vic 
time en train d’écosser 
des petits pois pour 
son repasdulendemain 
comme en témoignent 
les cosses de ce légume 
éparpillées à terre. Il 
la saisit par les che 
veux, lui asséna le pot 
à eau sur le crâne, 
puis se servit, dans 
l’intention de l’ache 
ver, d’un bougeoir que 
la victime avait hérité 
d’une tante, et enfin 
d’un portrait représentant le Président Carnot, qu’il avait 
décroché au préalable. C’est à ce moment que l’assassin 
se trouva dérangé par les voisins dans l'accomplissement 
de son horrible forfait. 
La concierge que nous avons interrogée affirme avoir 
vu la victime, pour la dernière fois, à 5 heures du 
soir. Cette dernière remontait chez elle, avec un pain de 
deux livres sous le bras, ce qui semble indiquer qu’elle 
attendait un invité. Depuis cet instant, que s’est-il passé? 
Toutes les suppositions sont permises. L’hypothèse du vol 
semble devoir être écartée. Brousse Angèle ne possédait 
aucune économie. Le corps a été transporté à la Morgue 
aux fins d’autopsie. Détail terrifiant : quand on souleva 
le cadavre de la malheureuse, la tête se détacha du tronc ! 
Le meurtrier de Brousse Angèle a pris le chemin du 
dépôt et a été immédiatement écroué. 
L’affaire est confiée à M. Deiss, juge d’instruction. 
A la manière du “ Gaulois ” 
MARIAGES 
Hier a été béni en l’église de la Madeleine, le mariage 
lu poete Marcel L’Herbier et de notre éminente collabo 
ratrice Natacha Liverka. La mariée était charmante dans 
sa robe de taffetas anglais rehaussé de catgut. 
Les témoins étaient pour Marcel l’Herbier, levidame de 
Cathelain et le caporal comte Camélia du Palmyr’s ; pour 
M lle Natacha Liverka, MM. Léon Daudet et Joseph Cail- 
laux. 
L<- chanoine Soulange-Bodin donnait l’absoute. 
La cérémonie avait lieu dans la plus stricte intimité. 
Reconnu au hasard du défilé : Prince et princesse de 
Faucigny-Lucinge, duc et duchesse de Doudeauville, 
duchesse de Rohan, M Jean Cocteau, M lle Cécile So- 
rel, etc., etc. Tout ce joli monde a été conduit au dépôt. 
Si ce numéro du (( CRAPOUILLOT » vous a intéressé 
ABONNEZ-VOUS 
Administ. : 5, place Sorbonne, Paris, France, 1 an, 20 fr. Six mois, 12 fr. 
A la manière du “ Temps ” : La vie chère 
Mercuriales 
Aux Halles les prix montent toujours. On cote ce matin 
le bœuf au pavillon de gros : aloyau de 6 francs à 9 fr. 50, 
cuisse de 5 francs à 5 fr. 80, paleron et collier de 4 francs 
à 4 fr. 25. Les beurres centrifuges charentais font de 
13 à 15 francs le kilog, les ordinaires de 7 fr. 50 à 8 francs, 
le mille suivant qualité. 
La hausse continue de ces denrées de première néces 
sité n’a pas été sans émouvoir nombre de nos lecteurs 
qui nous ont écrit pour nous en demander la cause. Une 
rapide enquête auprès des mandataires, commission 
naires, clievillards et grossistes, a suffi à éclairer notre 
religion. Loin de favoriser la hausse des cours, ces honora 
bles commerçants s'appliquent à la limiter, alors même 
que s’accuse ce phénomène économique, fatal en temps 
de crise. Le vrai coupable ici est le consommateur. Un 
besoin effréné de jouissance et de luxe jette tous les ache 
teurs sur les morceaux de choix et les produits surfins. 
De là*ces écarts de prix, excessifs il faut en convenir, 
entre les diverses qualités d’une même denrée. Pour 
quoi exiger le filet de bœuf alors que le collier et le 
jarret constituent un aliment excellent? Et n’est-il pas 
certain que le seul moyen d’enrayer la hausse des beurres 
extra serait pour le public de s’alimenter raisonnable 
ment de margarine et de saindoux? 
A la manière de “ Vlnlran ” 
Echo 
Chose vue. Hier, place de la Concorde, à l’heure où le 
soleil disparaît majestueusement derrière l’Arc de 
Triomphe, un poilu à fourragère—-un de ces simples 
poilus à fortes moustaches et à teint basané qui incar 
nent si bien l’âme immortelle de la France — examine 
le trottoir avec insistance. Peu à peu, les badauds s’at 
troupent. C’est la sortie des ateliers et nombre de mo 
distes au frais minois suivent avec intérêt les gestes du 
glorieux soldat. Enfin un petit pâtissier, vrai type du 
gavroche parisien, ose poser la question qui court sur 
toutes les lèvres de ces braves gens : 
— Vous avez perdu quelque chose? 
— Oui, répond le petit soldat avec des larmes dans la 
voix : cinq francs, mon prêt et mon unique fortune que 
je destinais à acheter une bague, car je suis fiancé à Stras 
bourg avec une petite Alsacienne. 
Un frémissement secoue l’auditoire. On sent, une fois 
de plus, vibrer l’âme collective de ce Paris, que, malgré 
leurs espions, les Boches ne comprirent jamais ! Mais au 
moment où un vénérable vieillard décoré de la médaille 
de 70 va proposer une collecte, un monsieur prend la 
parole : A ses cheveux grisonnants, sa redingote ornée 
d’un macaron rouge, à sa prestance, chacun reconnaît un 
officier supérieur en civil. 
— N’étais-tu pas au 186 e ? demande-t-il au poilu. 
— Oui, Monsieur... 
— C’est toi, qui m’as rapporté sur ton dos, au péril de ta vie 
alors qu’en patrouilleentreleslignes, j’avais été lâchement 
blessé par derrière ! Tiens, monbrave, je te dois bien cela ! 
Et le général, car c’en était un, glissa un petit portefeuille 
dans les mains du poilu stupéfait et s’éclipsa sans atten 
dre ses remerciements, tandis qu’une gracieuse midinette 
essuyait une larme d’un geste charmant, et qu’un brave 
sergotk neuf brisques esquissait, à tout hasard, le salut 
militaire. 
L’épicier du coin, sa dame et son 
bébé Zoé, âgé de sept printemps.
	        
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