A la Manière de la “ 'Vie Parisienne
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UNE PAGE D'ALBUM DE FAB1ANO : LA GRANDE GUETTE " (1914-1918)
Lettre de la Cousine
A la manière des “ Annales ”
Puisqu’on a déboulonné l’admirable plâtre consacré
par Sicardau cher Poilu de la Grande Guerre, pourquoi
ne remplacerait-on pas ce chef-d’œuvre par une statue
élevée à la gloire de la Femme Française ?
J’ai reçu tant de lettres à propos de mon dernier article
. sur ce sujet que j’y reviens une fois de plus. Les désirs
si affectueusement exprimés de toutes parts m’encou
ragent à me répéter. Je n’hésite jamais à le faire, quand
il s’agit de taper sur le même clou. Les lettres que je vous
écris depuis bientôt vingt ans, mes chères cousines, com
portent peut-être au plus une douzaine de thèmes, tant
mon désir est grand de vous faire comprendre, par des
enseignements réitérés, le rôle d’une épouse accomplie.
Donc, parlons de la Femme Française pendant la
guerre, et, si vous le voulez bien, commençons par le
commencement.
Le 3 août 1914, les femmes auraient pu protester contre
l'idée du massacre. Il n’en fut rien. Elles chantèrent,
comme dans l’opérette : « révenez vainqueurs vous aurez
nos cœurs! «Seules, quelques-unes essuyèrent furtive
ment des larmes. Mais que voulez-vous? On n’est pas
parfaites... Errare feminam est...
Puis elles s’engagèrent comme infirmières. Quel
dévouement, alors ! Quelle abnégation! quelle activité!
Chaque frais minois s’encadrait de voiles aseptiques;
chaque œil scrutait avidement les chers blessés, enfan
tins et virils à la fois ; chaque main aux ongles polis s’al
longeait vers les frais convalescents. On m’a cité des
traits charmants. Je sais un hôpital où des dames du
monde avaient accumulé compresses et confitures. Elles
réclamaient en vain un blessé. On leur envoya un malade.
Elles refusèrent avec dégoût ce souffreteux sans honneur.
Enfin elles reçurent un nègre. Alors elles l’épuisèrent
par tant de sollicitude, le bourrèrent de tant de sucreries,
que le nègre, au bout d’un mois, périt d’indigestion. —
Peut-on rien imaginer de plus touchant que ce trop-plein
de zèle, cette bonté si libéralement dépensée?
Je ne parlerai pas des marraines. Ce ne serait pas cha
ritable. Cette institution, charmante au début, causa des
déboires. Il est difficile de faire le bonheur des hommes
par correspondance.
Mais en revanche combien la Femme de France
montra magnifiquement sa valeur morale, dès qu’elle
s’employa elle-même au réconfort physique des soldats !
Avec quelle chaleur d’esprit, quelle largeur d’accueil, ces
collaboratrices de la victoire prirent pour objectif la vie
du mobilisé, afin de l’embellir, de l’emplir de joie, de
l’épanouir! Ah! chères sœurs de France, mon œil se
mouille à son tour, quand je songe au magnifique essor
que prit chez nous la vertu féminine durant la guerre !