L’ŒUF DUR — 13 
18 
Une heure plus tard, il se hasarde à revenir. Le comte de 
Lafaulx regardait toujours par le judas la trahison de sa femme. 
Non seulement il ne fit aucun scandale, — il facilita par la 
suite cette trahison. 
Et comme le domestique qui l’avait averti s’étonnait de 
cette étrange conduite et le nommait voyeur à ses camarades, 
M. de Lafaulx le manda, lui donna sa bourse pour le remercier 
de ce mot. Il lui donna aussi la batonnade — parce qu’enfin il 
était grand seigneur. 
J’ai oublié de signaler sa bravoure. 
III 
Marie 
Lorsque Marie eut sept ans, elle se découvrit elle-même. 
C’était un dimanche, à la messe. Les filles chantaient ; une 
sonnette tinta. Et Marie se demanda qui elle était et qui elle 
avait été. Et le demanda à ses parents. Mais une petite fille calme 
et douce, très silencieuse, dont, en somme, on n’avait pas à 
se plaindre. Marie sembla un peu déçue, puis se mit à vivre. 
Mais rien n’en fut changé. 
Son père était menuisier et sous-chef de la musique munici 
pale. Sa mère vendait de la mercerie et du papier à lettres vergé 
toile ou qualité supérieure. Le jour dont j’ai parlé, il faisait 
froid et l’on avait donné à Marie un gros cache-nez. Il était 
blanc, à rayures bleues. Elle l’enroulait deux fois autour de 
son cou, une extrémité devant elle, l’autre derrière. 
Marie fit sa première communion et le curé lui-même, qui 
était un rougeaud un peu engourdi, déclara que de cérémonie 
aussi édifiante, il n’en avait jamais vu. 
Puis Marie alla dans un couvent. Elle tenait un journal de 
sa vie. Le tout forma vingt-deux cahiers, dont chacun dédié 
à un saint. Elle avait apporté son cache-nez. Aux heures de 
récréation, elle y ajoutait quelque broderie. Il devint le centre 
de sa vie. Quand les vingt-deux cahiers furent achevés, elle 
rentra chez elle. On était venu la chercher en cabriolet. Et la 
supérieure, qui s’appelait la chère sœur Thérèse, mit une main 
sur l’épaule de la jeune fille, l’autre sur la croix de son chapelet, 
et dit que l’odeur des vertus de Marie avait réjoui la Sainte 
Vierge.
	        
Waiting...

Nutzerhinweis

Sehr geehrte Benutzerin, sehr geehrter Benutzer,

aufgrund der aktuellen Entwicklungen in der Webtechnologie, die im Goobi viewer verwendet wird, unterstützt die Software den von Ihnen verwendeten Browser nicht mehr.

Bitte benutzen Sie einen der folgenden Browser, um diese Seite korrekt darstellen zu können.

Vielen Dank für Ihr Verständnis.