L’ŒUF DUR
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Crois-moi, je ne mens pas aimable créature
Car j’ai trop bien la soif de toi
Pour ne pas avaler sans compter jusqu’à trois
Toute la mer et son chlorure.
Mais pour que je me noie décemment
Mon discours ne doit pas dépasser la mesure
Vois : je rends déjà l’eau avec usure
Dis adieu à ton amant...
Non, j’oubliais, toi aussi plonge.
Sans ça le poème serait boiteux
Et dégoûterait jusque dans leurs songes
Les couples amoureux. »
« Il n’y a pas de mal à ça
— Disait à Yseut la Blonde
Tristan qui entendait par là
Que l’adultère est de ce monde. —
Et puis c’est à cause de l’alcool
Qui mit à notre âme wagnérienne
Un désir de trop en bémol.
Mais tu n’es pas américaine :
Tu pouvais boire innocemment
Loin des lépreux et des traîtres
, Et saoulée prendre un amant
Avant la lettre.
Mais à propos de lettre, ô ma Blonde
N’oublions pas d’expédier
Nos mémoires à Bédier
Qui attend ça pour dîner dans le monde. »