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L’ŒUF DUR
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MAURICE DAVID
Rome
Les collines se paraient de bleu et jouaient de leurs grâces
autour du fleuve qui n’en coulait pas moins vers la mer. Romulus
le redisait à la ronde :
Petite plante à aiguilles,
Et vous, arbuste des morts,
Vos cigales, oiseaux-porcs,
Ronronnent comme des vrilles.
Remus le coupa court.
— Tais-toi, ombre d’homme, tu bailles là des rimes sans
raison, et nous tamponne le cuisseau.
Romulus, sensible au dur reproche, se tenait à quatre ou cinq
pour ne pleurer pas. Remus se conduisait implacablement mal
envers lui et d’une impertinente manière. Dans leur âge tendre,
il lui dérobait les plus douces confitures, s’en gorgeait, puis
courait sur lui, l’embrassait de force, lui couvrant tout le
visage d’une dernière bouchée et appelait leur mère commune
pour dénoncer sa prétendue gourmandise et ses mœurs glou
tonnes. Un autre jour, comme ils joufient avec leur cousine
Livia, Remus les avait entraînés dans un coin sombre du jardin,
et là, relevant soudain la tunique de Livia, lui baisa le ventre ;
et, à leur tante qui surgissait :
— O tata ! vois à quoi Romulus nous oblige I
Et, au désespoir de Romulus, amoureux de Livia, Livia
obéissait au doigt et à l’œil de Remus et se moquait avec lui
d’un jumeau négligé.
Plus tard, cela continua. Romulus aidait les cieux. Il ne savait
se plier à aucun exercice de corps et passait ses journées étendu
sur le dos ou se promenant à petits pas, plein de poèmes, tandis
que Remus étudiait les sciences paysannes et l’art de la lutte
et des armes.
Une nuit, Remus tira vivement Romulus du lit.
— Halo, toi, Romus, par dérision surnommé Romulus, romule,