Volltext: Ça ira (4 = 1920, juillet)

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ÇA IRA ! 
d’une sensation. André De Ridder 
ajoute qu’en agissant ainsi ils évitèrent 
l’émotion littéraire des romantiques et 
des premiers impressionnistes. Affirma 
tion toute gratuite, car peut-on imaginer 
œuvre plus anecdotique (malgré ou 
plutôt à cause de son dynamisme de 
contrebande)que le Songe duVagabond 
de Le Fauconnier, par exemple ? Cet 
art, quoiqu’en dise M. De Ridder sort 
bien de la même inspiration réaliste et 
superficielle qui caractérisa l’impression 
nisme. Et loin d’être un progrès, il est 
un retour vers le passé, dont il est bon 
de signaler le danger. 
Roger Avermaete, dans différents arti 
cles de critique parus dans “ Lumière „, 
semble également vouloir prôner cet 
abandon des conquêtes réalisées — au 
prix de quels efforts ! — par les cubistes 
de la première heure et souhaiter qu’on 
en revienne vers un art essentiellement 
sensuel et conçu pour la seule satisfaction 
des yeux. “ Comme on a fait des vers 
non pour le sens mais pour le son, 
— comme on a fait de la musique qui 
ne voulait rien dire, pour le simple plaisir 
de faire de la musique, — il est très 
possible de faire de la peinture pour la 
joie de la couleur. Ceci me semble une 
excellente tendance „ (N° 8, p. 124). 
Nous avons dit en quoi l’expression 
nisme est plus et mieux que cet u impres 
sionnisme exaspéré „, ainsi qu’ Aver 
maete baptise lui-même ce genre en 
parlant du peintre Jan Cockx. En somme, 
cette conception du rôle de la peinture 
se réduit à celle qu’Henri Matisse 
émettait, il y a longtemps, en souhaitant 
que “ l’œuvre d’art fut pour l’homme 
d’affaires, aussi bien que pour l’artiste 
de lettres un calmant cérébral, quelque 
chose d’analogue à un bon fauteuil qui 
le délasse de ses fatigues physiques „. On 
avouera que méconnaître les recherches 
et les résultats atteints par les peintres 
cubistes, au point d’en revenir à cette 
puérile théorie du tableau destiné uni 
quement à flatter les yeux par d’aimables 
couleurs, n’est pas précisément être 
partisan d’une évolution progressive de 
l’art pictural. Aussi cette tendance, si 
elle était unaniment adoptée, ne serait- 
elle autre chose qu’une dangereuse 
rétrogression, une réaction néfaste. 
D’ailleurs, la meilleure preuve qu’elle 
est loin d’être la conclusion logique et 
salutaire du cubisme intégral, c’est que 
la plupart des peintres qui la suivent, au 
lieu d’avoir évolué de la forme intransi 
geante du début vers ce succédané 
d’expressionnisme, n’ont pas participé 
au mouvement initial : à cette époque 
ils fabriquaient encore des toiles impres 
sionnistes. Ce ne fut qu’après coup, 
lorsque les principes du cubisme eurent 
définitivement triomphé, qu’il leur vint 
l’idée de changer la forme de leur art, 
tout en restant incapables d’en régénérer 
l’esprit. Et maintenant, ce sont précisé 
ment ceux-là qui prétendent être les 
seuls à avoir choisi la bonne voie, créant 
ainsi une confusion qui menace de 
discréditer l’art expressionniste tout 
entier. Car en voulant réduire celui-ci à 
une simple transformation technique, ils 
sont cause de ce que le public ne cherche 
pas à en apprécier la valeur véritable. 
De plus, de cette façon ils le rendent 
accessible à n’importe quel “ passéiste „ 
qui, se contentant de faire quelques 
concessions à ce qu’il croit être la mode 
nouvelle, deviendra un fort médiocre 
expressionniste ; finalement le public en
	        
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