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ÇA IRA !
Et l’égalité ne sera pas un nivellement
vers le bas. La nature répugne à ce
nivellement ; nulle part en elle, il ne se
trouve réalisé. Notre égalité signifie :
possibilité de vie humaine pour chacun,
plus d’exploiteurs et plus d’exploités,
plus de goinfres crevant d’indigestion
et plus d’affamés. Mais les plus grandes
facultés seront reconnues, et l’intellec
tuel, l’artiste, délivré du souci de gagner
sa croûte quotidienne, pourra créer les
œuvres qui feront de la civilisation
nouvelle la plus grande qui fut.
Et comme tout ce qui se réalise porte
en soi les prémices de sa fin, n’oublions
pas ceci : que le communisme n’est pas
le stade final du développement de
rhumanité. Comme le capitalisme, bien
tôt, va prendre fin, ainsi, dans un avenir
très éloigné, peut-être, le communisme
sera renversé. Il arrivera un temps où
ceux qui pensent comme nous le faisons
aujourd’hui, seront appelés réaction
naires, où de jeunes ardeurs rêveront
d’un ordre social nouveau. Que sera-
t-il ? Aucun de nous ne le saura jamais.
S’il peut être profitable de songer
parfois à ces choses, propres à réfréner
notre vanité, il est dangereux de s’y
complaire. Notre volonté d’agir s’en
trouve réduite. Or un avenir prochain
nous réclame, et nous nous devons
à lui. Paul.manthy.
Au moment de mettre sous presse, nous apprenons
la mort de Dr. H. W. Ph. E. van den Bergh van
Eysinga. Maintenant que toutes les énergies sont
nécessaires pour l’édificution de l’Humanité nouvelle,
cette mort d’un des meilleurs combattants, d’un des
plus purs et des plus clairvoyants, nous laisse appau
vris. Nous honorerons le mieux la mémoire du
disparu en tentant de faire notre la foi qui l’animait,
en tentant de réaliser le rêve magnifique qu’il tissait.
P. M.
Fragments
Notre époque a son classicisme, com
me le 17 e siècle eut le sien. Disons le :
SON classicisme et non le classicisme
d'il y a cent ans. Les professeurs, affir
mant encore que la beauté réside dans
la langue et l’esprit de nos ancêtres,
sont de mauvais prophètes. Nous
savons que Corneille, Molière, Racine,
etc., ont produit des merveilles. Nous
sommes les derniers à contester leur
force. Leur œuvre a amené notre
œuvre ; notre œuvre, ainsi, en amènera
d’autres. Donc, le classicisme contem
porain n’est pas “ l’anthologie des meil
leurs morceaux de la littérature „ que
conseillent les conseils d’enseignement
perfectionné.
La littérature est l'expression de son
temps. Les temps évoluent; la littérature
évolue.
Nous ne nous préoccupons pas de ce
qu’elle est durant les périodes de tran
sition ; une condensation de principes
courus, un affluent d’idées banales et le
triomphe des incompétences. Elle pré
pare, cependant, l’avènement des dieux
futurs;
Les dieux présents ne doivent plus
être défendus. Leur labeur constitue
notre classicisme. Notre époque est de
mouvement. Nous avons une extraordi
naire rapidité d’existence. Electrique,
cinématographique, trop fiévreuse est
notre journée. D’ailleurs, machinale.
Du lever au coucher, nous sommes
aéroplanes et machines à écrire ou cal
culer ; le moindre de nos gestes est
automatique ; notre cerveau également.
Et pour permettre à ce cerveau le repos
créateur, nous accélérons notre exprès-