ÇA IRA !
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d’ouvriers, manuels et intellectuels, s’élevant
au-dessus des décombres et entreprenant la
construction d’une cité neuve sur une base plus
saine que celle que permet notre société qui,
elle, se dirige indubitablement vers le renouvel
lement, pour que le livre s’élève au plan des
œuvres qui dirigent la pensée vers les temps à
venir.
Si Romain Roland n’a voulu que donner une
critique de notre époque et en montrer la
corruption et les forfaitures, son livre est
inutile — pour nous ; pour nous qui depuis
longtemps avons en notre conscience fait le
procès de la société actuelle et l’avons condam
née, pour nous dont les efforts tendent vers
l’établissement de normes nouveaux. Nous
savions que c’était l’Illusion, nommée Liluli
dans le livre, qui empêchait les hommes de voir
que les principes de Liberté, Egalité, Fraternité,
Amour et Raison étaient tournés en dérision et
que ce qui se présentait comme tels à eux n’en
portait que le masque ; nous savions que les
cultes s’étaient mis au service des Etats et
sanctionnaient tous leurs agissements ; nous
savions que la Vérité était réduite au silence ;
et que les diplomates et les politiciens, la haute
finance et la grande industrie gouvernaient les
peuples et les jetaient l’un sur l’autre quand
leurs intérêts à eux le demandaient ; et que
tout cela a fini par une catastrophe, la guerre
nous l’a montré. Ce dont nous avons besoin
est que ces hommes que nous reconnaissons
comme nos maitres et nos initiateurs (et Romain
Rolland est un des plus grands et des plus
aimés) viennent par leurs paroles et leurs actes
soutenir notre foi, et qu’ils se placent à notre
tête dans la lutte qui hientôt atteindra toute
son acuité.
Liluli ne nous apporte aucun encourage
ment.
Ce livre ouvrira peut-être les yeux à quel
ques bourgeois jouissants béatement de leur
contentement. Ce sera son mérite. Pour ceux
qui veulent la Révolution Sociale il n’est
qu’une agréable lecture. C’est son défaut.
P. M.
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J a ! (Stimmen des Arbeitsrates für Kunsl)
Berlin. — A Berlin s’est constitué un Arbeits-
rat für Kunst, un conseil de travail pour l’Art,
qui groupe une centaine d’intéressantes per
sonnalités du mouvement artistique contem
porain en Allemagne. Le Arbeitsrat adressa, au
début de 1919, un questionnaire à ses membres,
dans le but de définir les tendances actuelles,
et de créer la base sur laquelle l’œuvre com
mune de différents artistes, peintres, sculpteurs,
architectes, s’édifierait. Entre autres, y étaient
envisagés le secours gouvernemental, la situa
tion de l’artiste dans l’état socialiste, les
expositions, les monuments peints, l’accord
avec le peuple, les rapports avec les groupes
étrangers. Les réponses furent nombreuses ;
beaucoup, même, se bornèrent à n’envoyer
qu’une toile ou la reproduction d’une œuvre,
témoignant ainsi de leur enthousiaste adhésion.
Le arbeitsrat a réuni ces voix et les présente
en J a ! un beau volume édité à 55 exemplaires,
dont chacun est orné d’une gravure sur bois
par Lyonel Feininger, signée de l’artiste. Notre
cadre restreint nous empêche de considérer les
avis séparément ; nous devons nous contenter
de dire que cette tentative mérite notre intérêt,
et que ce recueil renferme d'excellents princi
pes en même temps que de justes idées. Les
reproductions qui clôturent le livre nous
montrent également des œuvres curieuses et
nouvelles. Nous sommes forcément partiaux
en relevant les noms de Adolf Allwohn,
Herman Finsterlin, Walter Gropius, Bernard
Hasler, Oswald Herzog, Eva Lau, Ernst
Osthaus, Richard et Werner Scheibe, Bruno
et Max Taut. Wilhelm Valentiner, Fritz
Stuckenberg, etc. parmi cette centaine d’affiliés,’