Full text: Ça ira (6 = 1920, septembre)

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ÇA IRA ! 
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des commentaires à la portée du premier 
venu. Il lui suffit de créer. C'est au 
spectateur de se donner la peine de 
regarder et de s’assimiler avec recon 
naissance la richesse que l’artiste met 
à sa disposition. 
Mais il semble bien, hélas, que le 
public ne sera jamais capable de se placer 
devant une oeuvre l’âme dépouillée de 
préjugés et le regard neuf. Car c’est un 
phénomène paradoxal mais indéniable 
que les hommes d’aujourd’hui ne se 
reconnaissent que dans l’image du passé. 
Et les manifestations d’art moderniste, 
qui sont cependant l’expression lyrique 
de l’époque où iis vivent, ils ne les 
comprennent pas. Pour les juger, ils les 
comparent stupidement au même étalon, 
qui leur sert dans l’appréciation de l’art 
des musées. Et ils parlent alors de retour 
aux Primitifs, d’art nègre et de peinture 
chiffrée et hiéroglyphique. Heureu 
sement, l’Expressionnisme n’est rien de 
tout cela. Il se peut qu’il y ait parmi ses 
soi-disant adeptes des peintres qui se 
sont contentés de cette réédition d’an 
ciennes formules, mais ce plagiat n’a rien 
à faire avec le style nouveau qui cherche 
à édifier une construction synthétique 
originale, directement issue de l'àme 
moderne. 
C’est ce que Paul Joostens a compris. 
Son œuvre témoigne d’une indépen 
dance farouche. C’est une tentative 
entièrement nouvelle, dont tous les 
éléments caducs ont été impitoyablement 
bannis. Nous ne saurions mieux en 
caractériser la juvénile audace qu’en lui 
appliquant le mot que l’artiste lui-même 
émit un jour : 44 L’art expressionniste? — 
un looping the loop dans l’inconnu... „ 
Georges MARLIER. 
NOTULES 
Les Livres 
Deux poètes flamands : Paul Verbruggen 
et Wies Moens. (1) 
Paul Verbruggen n’est pas un phraseur. 
Son livre? Quelques feuillets. Onze poèmes. 
Mais ces poèmes, riches d’émotion, sont beaux. 
Verbruggen redoute le vacarme des foules. 
Dans la solitude, son rêve est une reflexion 
sans fin. 
Il voit avec la naïveté perspicace des enfants, 
qui savent sans connaître, qui sentent oû est 1 
(1) Paul Verbruggen. Verzen. Teekeningen van 
Jos. Léonard. “ De Sikkel „ Antwerpen. 12° 
Wies Moens. De Boodschap. De Sikkel, Antwerpen 
E. Querido, Amsterdam. 8° 
le mal et oû le bien, qui contemplent la nature 
avec ravissement et qui débordent de sagesse 
parce que leurs sensations sont pures. Si 
l’homm : étouffe en lui la voix de l’enfant, 
Verbruggen se révolte, et s’efforce de revenir 
à la simplicité des cœurs sans péchés. / 
Il est croyant... Oh! les injures vont pleu 
voir. Des libertaires vont se*gausser, Des im 
béciles vont corner que Dieu est un préfet de 
police pour les masses illetrées. On hurlera 
qu’un civilisé n’a pas le droit de croire... On 
affronte calmement ces colères. On tente de 
montrer le chemin du salut. C’est le rôle des 
poètes, des musiciens. Un poète ou un musicien 
complet est croyant. Les rimeurs et les tambou 
rineurs, qui ne sont pas de cet avis, sont vains.
	        
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