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Belgique et apportait le témoignage de son adhésion. De jeunes
littérateurs qui venaient du Mercure et devaient y retourner : André
Breton, dialecticien remarquable et mystificateur habile ; Louis
Aragon qui tête aux rognons d’André Gide ; L. Ribemont-Dessaignes,
violent pamplhétaire, Gabrielle et Marguerite Buffet, Céline Arnaud,
Paul Dermée, Théodore Fraenkal, Philippe Soupault, J. Rigaut, etc.
devenaient dadaïstes.
Ce fut la brillante époque des festivals, des revues. Francis Picabia
qui, depuis 1913, écrivait des poèmes, sous cette forme de notation
télégraphique si souvent reproduite depuis, dans le Caméra Work,
293, fonda à Paris son 391, la plus belle revue du monde
dans laquelle on trouve de lui des manifestes, des poèmes et des
pensées d’une immense valeur,
DADA vivait.
Oui, mes amis, Dada vivait mais ne se renouvelait plus. On réédi
tait les mêmes farces et ce n’était pas drôle. On faisait de l’anticlé
ricalisme et de la politique. Picabia, qu’ennuyaient ces parasites qui
créaient à ses côtés une insupportable atmosphère de potins, de
racontars et de légendes, résolut de rompre non avec Dada mais avec
les dadaïstes et il le fit, avec son courage habituel, dans un lumineux
article qui parut dans Comœdia, suivi, quelques jours plus tard, d’une
lettre brève qui cinglait les sots, les imbéciles et les mufles. Ce fut la
fin.
Que de rêves brisés, d’espérances déçues ? Dada, sans Picabia,
devenait cette chose ridicule, émasculée qui nous valut le lamentable
procès Barrés et la piteuse manifestation de la galerie Montaigne.
Les clairvoyants : Suzanne Duchamp, Jean Crotti, Clément Pansaers
se retirèrent à leur tour, ne voulant point se salir au contact de gigo
los qui remplaçaient le talent par les beuveries et les lettres anonymes.
André Breton, lui-même, le plus intelligent du groupe, tira sa
révérence.
Les autres conduits par le petit Tzara que remorque le flasque et
grand Ribemont-Dessaignes restent dadas et quels dadas !
Elle est finie, l’histoire promise, mes bons amis, et le souvenir de
Dada se confond, dans le crépuscule, avec la cendre de nos cigarettes
parfumées. Pierre de MASSOT.