Full text: Littérature (1)

LA RUE RAY IG N AN 
Importuner mon Fils à l'heure où tout repose 
Pour contempler un mal clonl loi-même souris? 
L'incendie est comme une rose 
Ouverte sur la queue d'un paon gris. 
Je vous dois tout, mes douleurs et mes joies... 
J'ai tant pleuré pour être pardonné! 
Cassez le tourniquet où je suis mis en cage! 
Adieu, barreaux, nous parlons vers le Nil; 
Nous profilons d'un. Sultan en voyage 
Et des villas bâties avec du fil 
L'orange et le citron tapisseraient la trame 
El les galériens ont des turbans au front. 
Je suis mourant, mon souffle est sur les cimes! 
Des émigrants j'écoute les chansons 
Port de Marseille, ohé! la jolie ville, 
Les jolies filles et les beaux amoureux! 
Chacun ici est chaussé d'espadrilles : 
La Tour de Pise et les marchands d'oignons. 
Je te regrette, ô ma rue Bavignan! 
De tes hauteurs qu'on appelle antipodes 
Sur les pipeaux m'ont enseigné l'amour 
Douces bergères el leurs riches atours 
Venues ici pour nous montrer les modes. 
L'une était folle; elle avait une bique 
Avec des fleurs à ses cornes de Pan; 
L'aulre pour les refrains de nos fêles bachiques 
La vague et pure voix qu'eût rêvée Malibran. 
L'impasse de Guelma a. ses corrégidors 
Et la rue Caulaincourl ses marchands de tableaux 
Mais la rue Bavignan est celle que j'adore 
Pour les cœurs enlacés de mes porte-drapeaux. 
Là, taillant mes dessins dans les perles que j'aime, 
Mes défauts les plus grands furent ceux de mes poèmes. 
MAX JACOB.
	        
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