10
DÂCTYLOCOOUE
Une idée m’est venue, comme ça, la bouche en cœur, le chloro
forme sur table :
Le petit Jésus, sur une vache, est descendu un soir de réveillon
dans ma cheminée afin de me prendre ce que j’avais dans mes bot
tines ! Il fut très déçu de n’y trouver que son portrait. Il ne pouvait
décemment le rapporter, à cause de la Sainte Vierge.
J’habite à côté du Casino ; pour ne pas s’embêter dans « ce bas
monde », il faut une mise en scène appétissante, je ne suis pas comme
les autres, le Tango ne me plaît pas ; les croupes nerveuses sont pour
tant autant de caresses mais mon cerveau se crispe sur mon sexe ;
l’idée de jouissance fait briller le cuivre du talent minuscule que j’ac
corde à mes amis.
Je n’aime pas les faux passagers de la vie, les femmes qui croisent
leurs jambes comme les hommes croisent leurs bras, je n’aime
pas le renversement du programme, les mois pénibles, une étoffe de
soie que l’ongle écorche, le maquillage, prendre un taxi, une porte
d’entrée ; mais les fous, l’avenue Henri Martin, minuit, l’eau froide,
sont mes amis.
La femme qui se trouve en ce moment près de moi, caresse ses
seins, les pointes sont rouges ; sur chaque sein il y a un portrait, à
gauche Foch, à droite le Soldat inconnu. Son ventre est peint en blanc,
ses jambes en jaune, hélas, elle danse le Tango ! Ses fesses sont prises
dans une boîte à bougies, le dessus de la boîte est fendu ainsi qu’une
tirelire, de cette fente s’échappent des perles bleues, je les enfile. Les
bras de cette femme sont en plâtre, sans articulations, elle les tient
écartés, en croix. Tout à coup elle s’arrête de danser et je me sens pris
de vertige dans le silence impressionnant.
Les lumières s’éteignent, le gramophone joue « Rose », je me mets