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LES CISEAUX ET LEUR PERE
Le petit est malade, le petit va mourir. Lui qui nous a donné
la vue, qui a enfermé les obscurités dans les forêts de sapins,
qui séchait les rues après l’orage. Il avait, il avait un estomac
complaisant, il portait le plus doux climat dans ses os et faisait
l’amour avec les clochers.
Le petit est malade, le petit va mourir. Il tient maintenant
le monde par un bout et l’oiseau par les plumes que la nuit lui
rapporte. On lui mettra une grande robe, une robe sur moyen
panier, fond d’or, brodée avec l’or de couleur, une mentonnière
avec des glands de bienveillance et des confettis dans les
cheveux. Les nuages annoncent qu’il n’en a plus que pour deux
heures. A la fenêtre, une aiguille à l’air enregistre les tremble
ments et les écarts de son agonie. Dans leurs cachettes de
dentelle sucrée, les pyramides se font de grandes révérences
et les chiens se cachent dans les rébus — les majestés n’aiment
pas qu’on les voie pleurer. Et le paratonnerre? Où est mon
seigneur le paratonnerre?
Il était bon. Il était doux. Il n’a jamais fouetté le vent, ni
écrasé la boue sans nécessité. Il ne s’est jamais enfermé dans
une inondation. Il va mourir. Ce n’est donc rien du tout d’être
petit ?