ANDRE DERAIN
ANDRÉ DERAIN est né le 10 juin 1880 à Chatou, où son père, d’origine picarde, tenait
une boutique de pâtissier. Dès son plus jeune âge, il fait de la peinture. Mais son père qui
veut faire de lui un ingénieur l’oblige à préparer Polytechnique. Après avoir fait un court
séjour à l'académie Carrière où il rencontre Henri Matisse, Derain se lie avec Maurice de
Vlaminek son voisin. Le père d'André Derain était conseiller municipal, celui de Vlaminck
dirigeait la fanfare. Tandis que Vlaminck courait des épreuves cyclistes, Derain, lui, visitait
les musées. En 1992 Derain et Vlaminck ont un atelier commun près du pont de Chatou.
Sans code ni lois, par ces deux géants, l’école de Chatou est fondée.
C’est d'un voyage qu’il fait à Collioure, en 1905, que Derain rapporte ces paysages
fauves qui vont délivrer la peinture des brouillards de Londres. Mais, tandis que Vlaminek
s’enfonçait vers les forêts barbares du romantisme. Derain, lui. gagnait la voie royale du
classicisme.
Il y a la période austère, celle des paysages de Céret, celle des cézanniennes baigneuses
(1908), celle des paysages du Midi, celle de Cadaguez (1910) voisine des recherches de
Picasso. Il y a la période gothique et les œuvres ambitieuses La Cène, Le Samedi (1914).
Après la guerre. vient la série des paysages du Midi, du Lot ou d'Italie avec les arbres
nerveusement dessinés; puis les natures mortes, dont La Table de Cuisine, d’une composition
si noble dans son austérité, marque le sommet: les nus tantôt cruellement sertis, sculpturaux,
tantôts sensibles, frémissants; les portraits de femmes dominés par celui de M”m° Paul
Guillaume, de M"e Jean Renoir, de M”e Osuska; en 1930 les grands paysages de Saint-
Maximin d’une admirable cadence; enfin les natures mortes onctueuses, les fleurs sur fond
noir, les scènes mythologiques. Et toute cette œuvre considérable dominée par Pierrot
et Arlequin qui, réconciliés, mènent leur danse sur les ruines de notre monde en folie.
Derain est peut-être le seul peintre de ce temps qui ait dédaigné d’être actuel. Chacune
de ses toiles est une démonstration. Derain a abandonné les couleurs pures pour les couleurs
d’école. Qu'importe ! il a retrouvé les balancements dont Cézanne fut le dernier à risquer
l’équilibre. Il est le plus cartésien de nos peintres. Mais la seule réalité qu’il tient pour vraie
est celle qu’a établie son esprit. Il a courtisé successivement tous les styles, celui des nègres,
celui des romans, celui de Corot, celui de Cézanne et même celui d’un H. Rousseau. Curio-
sité universelle d’un constructeur qui contrôle ses calculs de résistance, et se soucie plus
du style que de l’humain.
Le peintre ne doit pas faire oublier le décorateur qui. pour les ballets de Diaghilew et du
comte de Beaumont. a réalisé des décors et des costumes féeriques.
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