demi-siècle et qui l’a précédé seulement de quelques mois dans
leur dernière demeure que domine, au haut de la colline de
Meudon, l’image méditative du Penseur.
Nous arrivons à la date de 1864, c’est celle où Rodin suit les
cours de Barye au Muséum et où il entre, comme aide, dans
l’atelier de Carrier-Belleuse. Ces deux artistes, dont les noms
accouplés détonnent si étrangement, sont donnés généralement
— et par le fait de Rodin lui-même - comme ses maîtres. En
vérité, Rodin ne s’était inscrit comme leur élève sur les livrets des
salons que pour se conformer à l’usage et pour affronter les
rigueurs du jury sous leur double autorité. Mais l’un fut
seulement son professeur dans un cours public et l’autre son
patron. On ne peut pas dire, cependant, qu’ils n’aient pas
exercé quelque action sur l’esprit du jeune artiste, mais ce n’est
que plus tard qu’il comprit la gravité hautaine du génie de
Barye, tandis qu’il fut entraîné, malgré lui peut-être, avec
indulgence et sympathie dans la voie du moderne Clodion.
Il travailla beaucoup pour lui et il l’imita.
Rodin resta, en effet, six ans chez Carrier-Belleuse, de 1864
à 1870. En février 1871, ayant étéjugé impropre au service de-
guerre, il suivit son patron en Belgique avec l’espoir de conti
nuer à travailler à son côté, mais il se produisit une mésen
tente entre eux; il le quitta, pour s’associer au sculpteur belge
Van Rasbourg, avec qui il collabora aux travaux de décora
tion de la Bourse et du Palais des Académies à Bruxelles.
Jusqu’à ce séjour en Belgique, les œuvres connues de Rodin
sont peu nombreuses : Il faut placer en première ligne comme
date, le buste de son père, d’une tournure grave, d’un accent
décidé, qu’une légende familiale considère comme ayant été
exécuté à l’âge de dix-sept ans, mais qui, d’après le maître, ne
serait pas de beaucoup antérieur au buste suivant, daté expressé
ment, celui-ci, des premiers mois de 1863. C’est le buste du
père Aymard, supérieur des Eudistes, auquel Rodin s’attacha
alors qu’il prit la soutane. Cet ecclésiastique, dont Rodin parlait
avec un souvenir plein d’estime, avait compris que la vraie