142
MÉMOIRES D’UN DADA BESOGNEUX
fonçait comme un navire désemparé : tant
d’assassinats, tant de drames, tant de mys
tères attristants, mal voilés, et qui pour lui
n’étaient même pas des mystères. Les
siens ont croulé sous le poids d’un far
deau qu’ils ne pouvaient plus porter, non
pas seulement celui de leurs propres fai
blesses, mais d’un Etat conçu d’après des
plans si périmés, si vieillots, qu’il était
comme un sépulcre vide, dont l’enveloppe
de pierre même tombait en poudre, en de
meurant si pesante ! Ils s’en sont allés
sans avoir compris, et sans pouvoir se dé
tacher du puissant voisin qui les remor
quait. Lui, ce voisin, avait la force, et
croyait à la force. 11 en avait assez pour
que son peuple survécût à sa propre chute.
Eux ont vu sombrer leur peuple, en même
temps que leur dynastie, prisonniers du
formidable complice qu’ils avaient pris
pour appui. Et voilà qu’ils n’en avaient pas
assez de cet empire dérisoire, qu’ils aspi
raient encore à cette ironie d’un sceptre...