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A
Paysages
et
accidents
cirage des avenues fines
le café d’aube d’où sortira le proverbe d’été
donné au profit de tous les projets de voyage
enfilés le long des galeries de flûtes
le nombril de cire fond
ainsi sur le fourgon de queue toutes les petites marionnettes
où allons nous se demande le monsieur qui a eu des déceptions
voilà maintenant le rire qui dégouline
ce sont des tranches de seins de verre
c’est un amour-mètre
c’est la menace perfectionnée d’un battant de cloche parapluie
et le passeport pour l’étage supérieur de l’armoire s’ouvre
il y a un glacier libre et les oiseaux
nous remarquons là le microphone
grossissant les pas et les paroles qui n’osent plus sonner
restent pour ainsi dire dans leurs coquilles
mais on les voit car ce sont des yeux
voilà où mène une heure d’oubli
voilà où mène une heure d’oubli
B
le bracelet de rubis vous pousse sur la joue
en bonbons acidulés de flamme
le feuillage des veines se répand avec la lenteur de la soif
c’est un vrai désastre
que les palpitations des murs des immeubles explique et accompagne
une auto
la jeune fille reste étendue sur le pavé
un mouchoir humide
un accident comme un autre direz-vous
voilà où mène une heure d’oubli
personne ne demande votre participation
aux spéculations excitées autour d’un mouchoir d’oubli écrasé
la nécessité sociale ne la justifie pas
voilà cependant où mène une heure d’oubli
à l’unanimité des abstentions quand il s’agit d’un tamponnement prévu
entre les os et les nombreux blessés en liberté
locomotive douleur qui marche vite en tous les sens
les sismographes auscultent la terre
opérations de bourse
la panique les cravates se nouent et se dénouent en chiffres
mais jamais la mécanique
n’enregistrera la congestion d’une heure tordue par les nerfs
cette écriture fine et mouvante du corps
indique les fleuves sur sa carte géographique
voilà où mène une heure d’oubli
comment voulez-vous comprendre ce que personne n’a encore compris
on se gratte les organes l’un après l’autre
une belle danse pour la solitude quand la langue est collée au palais
un timbre poste de musée glacial sur l’horreur des vitres vides et fixes
chacun de nous a un réservoir d’événements
qui s’accompliront dans l’ordre des commodités de sortie
ils sortiront comme les perroquets et leurs phrases
sans se soucier de la justesse de leurs intéressantes observations
voilà où mène une heure d’oubli
dans les tunnels d’avoine noire de fumée
TRISTAN TZARA