PREFACE
Aus Georges Rouault « Stella Vespertina », Avant-propos
de M.l’Abbe Maurice Morel, Rene Drouin, editeur, Paris 1947
Mit freundlicher Erlaubnis des Verlages
On sait quelle täche a reussie Rouault dans les hypocrisies
de notre monde, quelle anatomie. Il est bien peu d’infections
qu'il n’ait decelees, peu de miseres qu'il n'ait empoign&es. Il
n’est rien de ’homme qu'il n’ait fouill&g de ses pinceaux. Et
jusque sur les dents et les bas de la fille publique, jusque sur
la moustache et la toge du mauvais juge, jusque sur la veste et
sur le plastron, sur le faux-col et sur le binocle du bourgeois,
il aura releve des traces du Mal secret. Non qu'il les ait toujours
explicitement recherch&ges. Il etait si peu prevenu des horreurs
que cachaient ses patients qu'il reste surpris, qu'il s’effraye
encore, de certaines de leurs monstruosites et, ä son dire, s’il en
vint a incriminer notre magistrature c’'etait qu'äa ses yeuxX « toque
noire et robe rouge faisaient belles taches de couleurs ». Mais
il reconnait que l'art est une confession involontaire, il pourrait
ajouter : inconsciente. Chez un genie de cette espece, fond et
forme ne sauraient se demöeler, se separer ainsi que dans les
traite&s de litte&rature ou les ceuvres moralisatrices. Celui-lä
epouse si bien celle-ci qu'il ne cesse de la transfigurer. Et des
lors, quand Rouault joue du scalpel sur. son tableau, taille,
Ecorche, gonfle, etrangle, Ecrase, petrit, nous ne pouvons pas
mieux que Ilui preciser ä qui il en veut: ä la vieille haulmiere
qui sort d’une ombre louche, ä la masse d’un rose qui flotte dans
quelques flaques verdätres ou... ä la condition humaine. C'est
lä du reste ce qui Ilui vaut, des qu'il triomphe de lui-meme et de
ses creatures, de nous vaincre egalement, de nous convaincre,
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