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Creux comme un œuf.
Dans un gant d’air, la matière la plus subtile de l’univers organise ses
métamorphoses. A la pointe extrême de l’une, l’homme, barricadé dans
le raisonnable, tente vainement de se défendre contre la vérité du mouve
ment perpétuel qui, autour de lui, monte comme un océan et, précisant
peu à peu sa force, à petits coups de vagues dont la fréquence s’accélère,
démolit les fruits de ses plus laborieux travaux.
Telle était bien la situation lorsqu’à Zurich, en 1915, s’en alarmèrent
quelques hommes qui des quatre vents venaient, résolus dans le détail
de leur vie à refuser l’horreur stupide, l’horreur navrante, l’horreur stérile.
Cette faillite du raisonnable, cette banqueroute du penseur, depuis les
marches d’Alsace l’œil bleu-clair de Arp l’avait déjà diagnostiqué. Réso
lument, Arp enfourcha dada, assurant sur l’œil droit de Tzara le monocle
à cordon de soie noire.
Commença la valse du raisonnable.
Commença la vraie guerre, la terreur incivile. Arp est sur la brèche : il
jongle avec les maisons, avec les pierres, avec les tables et les chaises. Et,
peu à peu, au fur et à mesure que son orchestre se fournit, voici que de ce
jeu quelque chose se dégage — comme dans l’éprouvette du nihilisme pur
— lentement précipitent des cristaux annonciateurs d’un cycle nouveau
de réactions, amorce d’une nouvelle chimie. Ainsi s’organise l’esprit révo
lutionnaire : ainsi, par la dialectique de la démolition, se forme une cons
cience nouvelle.
A Paris, Breton et Soupault découvrent l’écriture automatique. Naît le
mouvement surréaliste auquel Arp participe tout naturellement. De cette
époque commencent ses recherches les plus décisives. Bientôt il écrira, en
allemand, la première version du siège de l’air, le plus violent de ses
poèmes, le plus agressif, celui où une fois pour toutes il codifie la démarche