Identite
L’identite philosophique se reduit pour nous â l’identite mathematique.
Chaise = chaise
17 = 17
C’est-â-dire qu’un objet dont Ies caracteres sont d6nombres est assimile â
une serie de nombres. Et s il se trouve un autre objet pouvant etre assimile
par ses caracteres au meme nombre ou au meme ensemble de nombres, il
est qualifie identique au premier.
Un objet repondant â certains caracteres est qualifie chaise, c’est-â-dire
que tous Ies objets ayant ces caracteres sont qualifies chaises. Et si ces
caracteres ont eux-memes Ies memes caracteres, Ies diverses chaises sont
qualifie identiques.
Nature morte de MARCOUSS1S
Galerie Raspail-Vavin
Pour juger ainsi il faut commencer par poser: Tel caractere = tel caractere. Et comme dans l’identite mathematique
reduire toute egalite â
1 = 1
C’est-â-dire en revenir â la conception de l’unite.
(La multiplicite des termes representant des objets â caracteres identique s’accroît avec le developpement de la notion
de nombre chez Ies peuplades primitives en meme temps que dâcroît la quantite des mots representant Ies objets â
caracteres juges differents, sous l’action du ferment abstractif).
A priori la notion de nombre n’existe pas. L’unite n’existe pas. II y a un nombre indefmi d’objets differents et non une
colection d’unites. II faut la confusion pratique d’objets tres semblables et leur valorisation semblable pour amener
l’esprit â en saisir non Ies differencss qui sont primitivement seules perţues, mais Ies analogies, C’est ainsi que naît
la notion d’unite laqielle engendre la notion de nombre laquelle retourne â la notion d’unite.
Or est-il possible de confondre deux objets? Pratiquement oui. Et pour nous civilises particulierement. Nous ne saisis-
sons des objets qu’une quantite tres faible de caracteres relativement â celle qui perpoit un primitif dont Ies sens sont
infiniment plus developpes. Mais en donnant â ce primitif des sens dix fois plus aigus que Ies siens, il est evident
qu’il ne connait de l’objet precisement que ce que ses sens veulent bien lui taire connaître, c’est-â-dire qu’il en recu-
eille un ensemble de sensations conventionnelles remarquablement £incompletes. Deux objets ont pour lui 999 carac
teres communs. 11 suffit que pour ce spectateur il existe un millieme caractere invisible, different chez l’un et l’autre
des objets pour que ceux-ci cessent d’etre.identifiables. Or il est impossible de dire que ce millieme caractere n’xiste pas,
La division meme en caracteres ayant une existence individuelle est une preuve de difference. Un objet n’a pas un
nombre de caracteres catalogables. Cet objet est. C’est nous qui par impossibilite de connaissance totale fragmentons
Ies sensations per^ues et Ies denombrons si besoin en est.
En supposant que cette fragmentation ne change en rien le total caracteristique (ce que nous ne pouvons affirmer),
en supposant que nous constations dans Ies deux objets la meme somme de caracteres identiques et que cette con-
statation reponde â ce qui existe, ces deux objets n’en seraient pas moins separes par leur existence meme. Le premier
objet existe. Le second objet existe, et d’une existence individuelle. Et chacun est lie â tout ce qui existe. Chacun ne
peut exister sans tot ce qm existe. Nous creons une verite chaise, une verite Amerique, alors que chaise est lie â
Amerique et reciproquement, et qu’xl n’y a pas de verite mais seulement tout ce qui est.
Etablir la notion chaise est un abus de pouvoir. De meme etablir l’unite chaise et par suite, la notion de nombre et
toute la construction qui repose sur Ies nombres.
Que sont Ies nombres ? Peuvent-ils exister en dehors des objets qu’ils accompagne»t ? Ils ne sont que le fait d’une
abstraction. Le quantitatif n’est qu’une forme qualitative au meme titre que Ies autres attributs et caracteres des objets.
Un bâton de deux metres a la qualite de deux metres comme il a la qualite cylindrique, dure, blanche, etc.
Quatre bâtons. Quatre est une qualite du groupe bâton envisage.
La Science des nombre est comparable â toute Science qui serait basee sur la durete, la couleur, la sonorite, la forme
Et l’on connait le resultat de l’activite intellectuelle resultant de l’etude combinaisons formelles, colorees, sonores, etc.
et leur importance „scientiflque".
2 = 2 n’est qu’une appreciation qualitative. Une appreciation qualitative n’est jamais qu’approchee, et en rapport avec
l’imperfection de nos sens.
Et d’autre part si l’on considere l’embryon identite
1 = 1
on est oblige de reconnaître que l’appreciation de l’unite est aussi qualitative que celle de 2, 17, ou 100.000, et d’autant
plus qualitative approches qu’il n’a pas d’objet identique â un autre objet.
Si l’on pouvait un instant supposer une existence propre aux nombres, et â l’unite, on ne comprendrait pas du tout la
conception des fractions. Si l’on peut diviser l’unite en un certain nombre de parties egales, elle cesse donc d’£tre
l’unite chaque fraction tievenant â son tour unite. Cette nouvelle unite est â son tour divisible, et celle d’etre unite,
ceţte operation se repâiant un nombre indefini de fois.
Pour s’en tenir â la notion d’unite, il faut en arriver â sous-entendre comme propriete de cette unite un certaine nombre
de caracteres concrets la rendant indivisible. Et cela la rejette dans le domaine qualitatif, lui donne une existence
hypothetique, et si on la transpose dans la realite, lui assure un cortege de caracteres que nos facultâs ne nous per-
mettent pas d’apprecier mais qu’il nous est interdit de negliger.
Nous ne pouvons pas dire
mais nous ne pouvons pas non plus supposer
1 = 1
1 1
puisque ces formules impliquent la mesure de la quantite 1, et l’on ne peut mesurer 1 ou tout autre „grandeur“ qu'avec
une „qualite" ptise comme unite, ce qui recule Ies bornes de cette operation d’une maniere indefinie.
6. Ribemwnt Bessaîgnes