L’ŒUF DUR
10
16
Imprimerie Alençonnaise, 11, rue des Marcheries.
plaire. Le perroquet dévide des noms propres de villes sud-américaines.
Le matelot jongle avec les oranges. Hypermétrope, il voit de loin et c’est,
ma foi, fort agréable pour la galerie. Malheureusement l’opticien du trans
atlantique (grand bateau-mouche) n’était qu’un horloger qu’on avait engagé
pour la circonstance. Le marin se retourne pour allumer sa pipe et son
cœur, son ballot aux étoffes rayées baille, et l’on y voit : « Le Livre et la
Bouteille » de M. André Salmon.
Francis Gérard et Mathias Lübeck.
Le cygne androgyne, par Joseph Delteil, aux Images de Paris.
M. Delteil, ayant remarqué dans son livre l’alternance des rimes mascu
lines et féminines, l’appelle « le Cygne androgyne». Il procède des mauvais
imitateurs des imitateurs de Mallarmé et dédie son livre à M. de Régnier.
Toute une époque, comme on dit. L’honorable licencié ès lettres parle
d’« eau ambiguë » et d’« aurore impubère » ce qui est défendable, mais
aussi de « languides galères », de « lacté chiendent », de « seins vertigineux »
et de « vent théologal » ce qui l’est beaucoup moins ; il discourt sur l’Insexué,
les Vierges, la toison et patati et patata. A lui seul, son poème « Les glaives
caducs » est un bonheur. M. Delteil harangue les glaives brandis « Dans
l’or rationnel, égal et socratique, que secrète en brûlant ma pensée authen
tique » et termine fièrement sans peur du qu’en dira-t-on par ces mots :
J’oppose à vos actes mon Scel, glaives caducs brandis par des poings éter
nels ! » On croirait à un joyeux drille du genre Fourest, mais hélas,
M. Delteil n’a rien d’un loustic. Un petit poème « Rhin », dans le goût
* Alcools », bien sûr 1 est plaisant. Mais le reste ne vaut pas tripette.
Mathias Lübeck
Vitriol et Confetti, par Cami, au Merle Blanc.
Ce livre ne vaut pas, évidemment, « l’Homme à la tête d’épingle », chef-
d’œuvre du maître ; mais Cami sera toujours aimé : il est le Jules Verne
loustic et un peu cochon de nos jeunesses plus curieuses de phénomènes
psychologiques que de phénomènes physiques. Son amour de la phrase toute
faite et de la légende feuilletonnesque touche aux larmes, amour sincère
mais tempéré d’ironie, car il craint les responsabilités. Ses plaisanteries
faciles, calembours, expressions consacrées en action ont le charme de
l’imprévu connu d’avance Dans le roman qui clôt ce livre * le Plafond »,
Cami s’avère plaisant imitateur des auteurs de M. Laffitte : Maurice Leblanc
et Gaston Leroux. J’aurais dû — puisque le héros s’appelle fâcheusement,
Loufock Holmes, citer aussi M. Conan - Doyle. Malheureusement je n’ai
encore jamais eu l’occasion de lire cet auteur anglais, que l’on dit passion
nant.
Mathias Lübeck
De plus nous avons reçu :
Le Chirurgien des Roses, par Marcel Sauvage (Ça Ira); Gravures,
de Flouquet (Ça Ira) ; Vers une République heureuse, de Maxime Le
roy ; (P ro ? r ès Civique) ; Poèmes de la Vie mordue, d’Henry Dalby
(Images de Paris).
Le Gérant : Jean ALBERT-WEIL.