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L’ŒUF DUR
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U ne merveilleuse escadre appareille
à travers les armatures de fer galvanisé
au-dessus de la bulle lumineuse
qui montre l’endroit exact où la nuit cesse de se pervertir
le Paradis allume et éteint son enseigne lumineuse.
Un chasseur sans fesses, avec des ailes de pigeon domestique
vend de la « bigornette » aux saintes des anciens temps
dont les robes blanches sentent la harpe Directoire et la lavande
et la sueur populaire des grands cirques latins.
La fête ne peut, étant donné l’état actuel de la science,
monter plus haut que le paradis théologique
où la plus haute pensée
vient crever comme une bulle et s’épanouir
à la manière d’un accord de guitare hawaïenne.
La Place Pigalle ronfle comme un poêle où l’on brûle de tout.
Les têtes fragiles
sentent à la nuque une détonation de carabine
mais la pipe en plâtre ne dégringole plus
dans un bruit d’argent.
Un phonographe avec une voix de prêtre
chante pour les initiés « Now and then » ;
Les roulottes noires protègent les jupes retroussées d’une enfant
et la mère surveille l’ombre, la tête inquiète
les mains sur son parapluie, les yeux sur la culotte de son enfant
dans le rayon d’or qui se coule entre deux voitures
jusqu’à la Place Pigalle
qu’une flamme conquérante dévore à petites nuits.
Simonne a payé sa place.
Elle grimpe sur le manège cabré comme un léopard.
Ses deux jambes vêtues de soie crème
pendent le long d’une licorne.
Un clown perdu dans la foule
donne la main à un agent.
Simonne est blanche comme un clown.
Elle tire de son sac à main
une cigarette qu’elle allume