Volltext: Ausstellung Pierre Bonnard, Edouard Vuillard

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meubles (car Bonnard a dessiné des meubles), du Pont-Aven de Gau 
guin et de Sérusier, son prophète, lequel convertit aux nus maniérés 
et aux chevelures stylisées la jeune équipe composée entre autres de 
Vuillard et de Bonnard; 1904, les modèles au repos, les études serrées 
de valeurs sur un fond uni, c’est le moment où Bonnard devient l’in 
timiste de la femme, et Vuillard l’intimiste des soirées sous la lampe; 
puis ce sont les places de Montmartre, les femmes au tub (bien diffé 
rentes de celles que peignait Degas) les déjeuners, les fruits, les paysages 
mouillés comme des chansons de Verlaine — le poète que Bonnard a 
le plus aimé, et dont il a illustré le Parallèlement. 
Bonnard ne passe guère à Paris que deux mois de l’année; ce sont 
ses semaines de réflexion, de méditation; il compare alors entre elles 
les peintures qu’il rapporte et cherche à se juger avec clairvoyance. 
Le reste du temps il travaille six mois dans le Midi, au Cannet, et quatre 
mois en Normandie, à Vernon, près des Andelys, où il possède une maison. 
Il avance la main vers un tiroir (une main de peintre avec des ongles 
comme écrasés); «Attendez, dit-il, je vais vous montrer quelque chose». 
Il me tend alors une petite toile, sa première œuvre, peinte quand il 
avait seize ans, un ravissant paysage empreint de cette douceur lumi 
neuse très «Ile de France», dont Corot fut le grand harmoniste: «Quand 
on est jeune, me dit Bonnard, on s’enthousiasme pour un endroit, un 
motif, pour la chose de rencontre, c’est cet émerveillement qui fait peindre. 
Plus tard, on travaille autrement, guidé par le besoin d’exprimer un 
sentiment; on choisit alors un point de départ mieux en rapport avec 
ses propres capacités». 
Je regarde, adossée au mur, une nature morte ancienne peinte avec 
brio par quelque Italien de 1 ’ottocento, et Bonnard me parle de cette 
technique arrêtée, de cette manière qu’apprenaient les vieux maîtres. 
La technique s’est libérée de ces recettes, on a tout changé, et c’est bien 
plus difficile. En face de chaque œuvre nouvelle, le peintre se trouve 
aujourd’hui devant un recommencement. 
Pierre Bonnard se juge sévèrement, il est assez fort pour cela. Je 
l’ai vu apprécier devant moi tous les tableaux qui sont partis pour l’ex 
position de Zurich: ses réflexions étaient tellement objectives que je 
croyais l’entendre critiquer la peinture d’un autre. Bonnard n’avait 
pas de mots assez cruels pour dire ce qui n’allait pas, montrer telles 
qu’elles lui apparaissaient les défectuosités de ses meilleures œuvres: 
«Tenez, dit-il, en me montrant un paysage, c’est gentil, mais c’est un 
petit motif, c’est embêtant, il faut fuir le petit motif, la petite chose 
qui vous accroche et autour de laquelle on brode des inutilités». Avec 
un tel peintre; pas d’histoires de rivalités, pas de pose: c’est l’homme 
que les gêneurs doivent fuir naturellement. Il faut l’entendre parler 
des contrées qu’il aime, sa voix s’anime, il trouve des mots pour dé 
crire comme, instinctivement, avec des couleurs, il sait créer cette poésie 
des yeux qui nous entraîne dans ces régions intactes et fraîches de l’en 
fance, que Bonnard a toujours su préserver. Bonnard a le don d’en 
chanter, de peindre juste, de faire croire qu’il improvise tout en tra 
vaillant lentement, posément. Parmi les peintres qui se sont plus ou moins
	        
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