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PHILIPPE SOUPAULT
« Adieu alors la littérature dans le sens restreint. Dada n'est donc
pas une “ esthétique ” nouvelle; il n'a eu, au reste, pour le défendre,
que les survivants du symbolisme ou de l'esthétique. Aussi n'est-ce
pas là qu'il faut voir un signe, même confus, même outrancier, d'un
renouveau littéraire futur; une telle entreprise est aussi surannée et
éloignée de l’art sain que réclame notre temps que les imitations où
tant de jeunes littérateurs s’obstinent, croyant qu’il suffit, pour les
rajeunir, d’emprunter quelques traits singuliers à un Giraudoux, un
Proust, un Apollinaire, par exemple. En s'écartant de la vie et du réel
en ne cherchant le renouvellement — dont ils sentent le besoin — que
dans les bizarreries de forme, ils n'aboutissent qu’à de pénibles compli
cations aussi ennuyeuses que la platitude. Au vrai la plupart des
œuvres qui nous sont proposées par des écrivains encore jeunes ont
l’air d'être la fin, la "queue” de quelque chose: nous assistons au
crépuscule des disciples. »
Monsieur Henri Massis me mettait fort aimablement en cause.
Je lui adressai la lettre suivante :
Monsieur,
Je tiens à vous remercier d’avoir bien voulu, dans la Reoue Universelle du i5 octobre, me
dédier une phrase de Renan. Est-ce un piège que vous nous tendez, est-ce une boutade?
Cette “ entreprise ” dadaïste, comme vous semblez le croire, n’est pas aussi surannée et
éloignée de l’art sain que “ réclame notre temps”.
Nous verrons bien d'ailleurs. Nous avons proposé un problème et personne ne veut l’exa
miner, parce qu’il faudrait y apporter une solution. Mais vous devez reconnaître avec moi que
la poésie néo-néo classique, elle aussi n’aboutit qu’à de “pénibles complications aussi ennuyeuses
que la platitude ”. La poésie est en jeu. D’elle jaillira peut-être “ce renouveau” que vous
souhaitez. Ce qui m’étonne, c’est que vous ne vouliez pas voir la poésie. S’il est évidemmen
“ plus commode d’aller lege éolutus. ” il est encore plus simple de déclarer “ Politique d’abord ”.
A mon tour je me permets de vous dédier cette phrase de Renan. Monsieur Jules Huret
lui aussi, poursuivant jadis une enquête sur l’évolution littéraire raconte : “ Il me fallait bien
pourtant prononcer pour la dernière fois les mots fondamentaux de cette enquête et je réussis
à dire dans un dernier effort : symbolistes (c’est-à-dire pour Monsieur Huret : Moréas,
messieurs Charles Maurras, Henri de Régnier etc....) Psychologues (c’est-à-dire Jules Lemaitre,
Monsieur Barrés). Naturalistes (c’est-à-dire Monsieur Léon Daudet).
A quoi Monsieur Renan répondit :
— “ Ce sont des enfants qui se sucent le pouce.