Lui : Alors vous permettez ?
Ils entrent dans la danse et continuent
la conversation en dansant :
Lui : Vous aimez la valse ?
Elle : Ne pas aimer la valse, ce serait
ne pas aimer la danse.
Lui : Moi “ j'aime la danse à m'en jeter
par la fenêtre „ comme a dit un
poète.
Elle : Vous êtes gai...
Lui : C'est ma caractéristique.
Elle : Attention, vous allez tomber.
Lui : Si je tombais, ce serait amoureux
de vous.
Elle : Je vous redresserais.
Lui : Regardez ces deux, ils dansent
comme des sauvages.
Elle : Ce monsieur m'a tout à l’heure
accroché la jupe au passage.
Lui : Un vertige m’éblouit comme si
j'avais trop bu.
Elle : Je devrais finir par en douter
Lui : C’est votrecontactcapiteux,chère
amie
Elle : N’insistons pas, je vous en prie
Lui : O nous tournons vite, vite, vite.
Est-ce que vous touchez encore
le sol ? Moi j'ai l’impression
d'aller tout seul.
Elle : C’est la force centrifuge.
Lui : C’est cela. Pourquoi n'obéissez-
vous pas à l’impulsion qui vous
pousse ? C’est un plaisir et vous
voulez vous en priver, vous, une
femme supérieure... Si si si, je lis
cela dans vos yeux, vous êtes une
femme supérieure... et puis vous
dansez à ravir.
Elle : C’est un compliment.
Lui : Le premier ; je n’en suis pas pro
digue, vous savez.
£//e : Je vous en prie ne me serrez pas
ainsi. C’est une très mauvaise
habitude.
Lui : Je la rachète par des côtés sérieux.
Elle : Je vous aimerais mieux ainsi
Lui : Mieux est parfois l’ennemi du bien.
Elle : Que voulez-vous dire ?
Lui : Je ne veux rien dire du tout... je
vous désire...
La valse expire.
Elle : Je vous remercie, Monsieur.
Lui : Moi de même, Mademoiselle.
Quelques minutes après. Au buffet, le
jeune homme prend un rafraîchissement. —
Passe un de ses amis.
L'ami: Tiens, bonjour ma vieille branche,
eh bien, comment les trouves-tu ?
Lui : Qui ?
Z/ü77Z/;Mais les femmes, parbleu.
Lui : Elles sont stupides.
Paul NEUHUYS.