PIERRE REVERDY
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tante affaire, elle aimerait voir châtier le coupable, et elle envahit l’es
calier principal de la maison qui en comporte un autre, celui-là tout à
fait secondaire, mais bien plus précieux pour le voleur qui se contente
de l’emprunter — cette fois — pour s’esquiver et disparaître à jamais
aux yeux de tous.
Mais, placée sur les dents, 'la police est dans une position dangereuse
pour tout le monde. On la voit faire irruption dans une chambre voi
sine de celle qu’elle vient de trouver vide.
Là, vit depuis fort longtemps un élégant petit appareil photogra
phique, dont le seul défaut, que d’autres disent son principal mérite,
est d’être atteint du délire de la perfection.
Il est arrêté, emmené, frappé. La foule, heureuse, hurle ses bons sen
timents de vindicte publique.
Après une instruction qui dure depuis trois ans, le malheureux dé
tenu n’a pas encore avoué.
La justice, de son côté, n’a pas su faire la preuve de la culpabilité
de l’homme qu’elle détient hors de la circulation normale et qu’elle
prive d’une liberté chèrement conquise depuis l’abolition, fort regret
table d’ailleurs, de l’esclavage.
Par bonheur, on voit arriver entre dix et onze heures du matin sous
la voûte céleste, donnant accès dans les couloirs de la préfecture de
police, l’intrépide navigateur que nous avions abandonné à un sort plus
aventureux, au début de ce conte.
Au moment d’entreprendre une nouvelle croisière sous le feu in
cessant de l’ennemi commun, il a eu vent de l’injustice qui se commet
tait ici au nom de l’humanité, car les marins connaissent tous les secrets
du vent.
Il est accouru. Il réclame le prisonnier. Vous direz... Comment?...
Oui, car sortant une pièce de 25 centimes à peine usagée de sa
poche profonde, il a désintéressé pour toujours la Brenner Gesellschaft
Diskontobank.