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sidéré, prendre la contre-partie d’idées qui ne sont pas celles dont l’application a
été fatale à Dada, au contraire.
Le 27 août, le même journal publie la lettre suivante de Philippe Soupault :
« Permettez-moi de rectifier quelques erreurs de détail, qui n'ont en somme
aucune importance.
Dada n’est pas mort pour la bonne raison qu’il ne peut pas mourir, ou, si vous
préférez, qu’il n’a jamais existé...
Dada n’a jamais rien voulu prouver. Il a suscité beaucoup de colères, beaucoup
de rires, mais personne n’a jamais pu le définir. Dada, en effet, n’est qu’un état
d'esprit...
Ce qui importe, après tout, à ceux qui ont su la vraie grandeur et l’incompa
rable force de Dada, c’est que tous les fruits pourris se détachent de l’arbre. Il faut
être trahi. »
Ces quelques lignes, qui se passeraient si bien de commentaires (les lecteurs du
FiGARoles jugeront stupides et Philippe Soupault se réjouira) m’inclinent pourtant
à penser que leur auteur ne se rend pas très nettement compte de la situation. Mon
intention n’est pas d’épiloguer plus longtemps sur la mort de Dada, mais se peut-il
que quelqu’un soit encore dupe du mode de raisonnement dont Soupault nous
donne ci-dessus un exemple si caractéristique? En ce qui me concerne, je sais à quoi
m’en tenir sur la contradiction verbale et je n’ai garde de la confondre avec une
autre plus profonde. J’y vois même une des principales erreurs, une des plus sûres
causes d’épuisement de Dada. Ce sont de tels procédés qui, en se généralisant, où
il y avait un état d’esprit, laissent une école. Quelle école ! « Tics, tics et tics. »
Mon cher Soupault, nous avons maintenant mieux à faire qu’à nous produire ;
jadis nous l’avons écrit ensemble : il s’agit de toute autre chose. Moi, voyez-vous,
je ne l’ai pas oublié et, comme j’ai encore quelque amitié pour vous, j’ai peur que
vous en soyiez pour vos grâces.
André Breton.
SA ROBE EST NOIRE DIT SARAH BERNHARD.
Rrose Sélavy.