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MÉMOIRES D’UN DADA BESOGNEUX
payer le loyer de leur petit logement de la
rue Payenne : il n’y a pas de mobilisés
dans la famille ! Elles sont toutes seules,
elles ont toujours été seules, depuis des
années...
La veuve a bien une petite rente, de
quelques centaines de francs, parce que le
mari fut un modeste fonctionnaire. Mais
qu’est-ce que cela ? Cette pension était
déjà insuffisante,aux temps d’avant-guerre,
quand les choses n’étaient pas ce qu’elles
sont devenues depuis : elle travaille « poul
ies grands magasins » ; de ces miséra
bles travaux, qui sont si peu payés. La
fille aussi, travaille : avec de petits pots
de colle et de couleurs elle fabrique des
éventails à bon marché. C’est toujours
comme ça que je les ai vues : M me Blin,
penchée sur sa couture ou sa broderie ;
Elise, sur sa table de bois blanc, au milieu
de couleurs vives qui font paraître plus
pâle encore sa figure longue, qui serait
jolie, si elle n’était si pâle. Que voulez-