MAGNÉTIQUES
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« mon sang, il est temps de me rendre ma liberté.
« Vous m’avez appris à écraser mes plus curieuses
« cruautés, j’ai hurlé de désirs et j’ai dû marcher
« au pas sans regarder les fumées des agglomérations
« malsaines. A toutes mes haines acidulées, vous
« avez donné le narcotique raisonnable. J’ai long-
« temps aimé ce revolver qu’on voyait dans la bou-
« tique de l’armurier. Tout est bien fini maintenant.
« Je connais votre lâcheté et j’ai parcouru les régions
« brumeuses et solitaires. Je suis parti pour toujours
« avec ces deux amis qui ne m’abandonneront
« jamais : mes deux mains plus fortes que la lumière.
« J’ai vu tous les ports d’attente, tous les paysages
« passionnés. Je sais les cris fervents des insectes,
« les vols poussiéreux des oiseaux de passage et les
« bonds calmes des bêtes fauves. J’ai vendu des
« crimes et des larmes inodores, j’ai trafiqué avec
« orgueil et j’ai soif encore. Personne ne peut me dire
« une richesse nouvelle. Les diamants des Indes, les
« pépites de Californie ne m’intéressent plus, j’ai vu
« de trop parfaits idiots. Les déserts m’ont paru
« grotesques, j’évite maintenantles oasis. Le royaume
« des collines parfumées est à la portée de toutes les
« bourses et je connais très bien les plages sans
« végétation tropicale. »
Il s’était levé et marchait à pas lents sur un quai.
Il entra dans un café plus lumineux que les autres :
une cigarette se consumait entre ses doigts. Un an