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MUSIC-HALL
Miss Nina Payne à VOlympia
Evidemment, l’occasion se fait trop rare de rencontrer
une femme qui ne dissimule pas le visage de ses œuvres
sous la voilette d’un « synchronisme » épais ou d’une autre
ténébreuse dénomination, — pour ne pas saluer Nina Payne,
cette fée stridente et claire de la danse moderne. Mais il
s’agit d’abord de s’entendre sur le sens de ces mots.
On conviendra de la danse — si longtemps rentée par
l’aimable menue-monnaie des pointes et des entrechats! —
qu’elle n’a pris son visage moderne qu’avec l’apparition des
« Ballets Russes ». Fokine, Nijinsky, Massine surtout, ont
réappris au corps humain à se comporter vis-à-vis de la
musique d’égal à égal et non plus selon la sécheresse et la
précision intimidées des anciennes chorégraphies. La danse
qui n’était qu’une ligne mélodique et grêle de l’expression
plastique, s’est orchestrée, pour ainsi dire, de toutes les res
sources de la pantomime et de la pensée. Intellectualisme
qui aboutit avec le « Sacre du Printemps » à une ingé
nieuse et redoutable synthèse.
Mais cela, malgré tout, créait une esthétique démodable
et aujourd’hui démodée, cela mettait la danse au pas des
autres arts, mais ne nous donnait pas l’équivalent de ce
qu’un poème de Cendrars ou l’orchestre des Billy Arnhold
sont pour l’illustration de notre temps.
Grande, mince, dégingandée, harmonieusement noncha
lante, Miss Nina Payne a vraiment l’air de ne venir de nulle
part. Que de demoiselles à qui leurs jambes permettent un
usage récréatif, croient découvrir un style sans origines, qui
en réalité, cherchèrent leur invention dans la boîte d’où
s’échappa le miraculeux pantin de Pétrouchka, ou exploi
tent laborieusement la fantaisie de la « petite fille » de
Parade! Un décor imprévu, un costume amusant, une