ÇA IRA !
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les enfants recueillis par les institutions de
charité américaines et anglaises présentent
vraiment “ le type extrême de l’humanité
Européenne créée par la guerre ; au-delà
est le cadavre — Mais combien insuffisants
les secours apportés à cette population réduite
à vivre misérablement d’aumônes.
Le cri de la Carmagnole :
“Du pain pour nos frères !„
ne trouve en Europe qu’un bien faible reten
tissement. Car les peuples ont été tous rude
ment éproyvés par près de cinq années de
guerre, et songent surtout à panser leurs
propres blessures, si bénignes soient-elles.
D’aucuns, aveuglés encore par l’absurde haine
de tout ce qui est boche, trouvent que c’est
bien fait, et, un mauvais sourire sur les lèvres
prétendent naïvement que le peuple autricien
expie maintenant par la faim le crime d’avoir
fabriqué de l’artillerie lourde pour détruire nos
cités et massacrer nos fils. Hommes pusillani
mes qui ne peuvent comprendre que devant
l’immensité des souffrances du peuple autri
chien, tout ressentiment, fut-il légitime, se doit
taire spontanément pour faire place à la pitié.
Faut-il, parce que quelques-uns parmi les
potentats qui déclenchèrent la guerre étaient
autrichiens, que les enfants de Vienne ressem
blent plutôt à des equelettes décharnés qu’à
des hommes? Pourquoi veut-on laisser périr les
habitants de l’Autriche alors que le rélèvement
des ruines partout exigera les efforts de tous ?
D’aucuns déjà ont fait le geste généreux et
sont venus en aide à ces malheureux si éprou
vés. De l’Angleterre, de la Suisse, d’Amérique
surtout vinrent des nombreux secours ; on
installa des cantines publiques, où les jeunes
enfants de la capitale déchue sont réconfortés
d'un bol de soupe et d’une tranche de pain ;
les hôpitaux et les asiles ont été approvision
nés pas les soins inlassables de quelques
philanthropes. Mais tout ce qu’on a fait
jusqu’à ce jour paraît être bien insuffisant pour
sauver Vienne et ses habitants d’une ruine
complète ; comment, avec les moyens précaires
dont on dispose, comment, ravitailler efficace
ment une ville de plus que deux millions
d’habitants ? — Pourtant, de par le monde, il
existe encore force gens qui veulent se sou
venir des enseignements du Christ et appliquer
le précepte : “Aimez-vous les uns les autres,,.
Mais la plupart ne savent pas ce qui se passe
à Vienne, encore que ce soit tout près d’eux,
et se fient à leur journal qui n’en parle que
très vaguement.
Et ceux qui, pendant la guerre de 1914-18
se tinrent prudemment à l’écart et s’enrichirent
scandaleusement en fabriquant des chars
d’assaut ou des boucles de ceinturons sont trop
occupés à arrondir leur fortune fabuleuse et
mal acquise. Non contents de laisser le peuple
viennois crever lamentablement comme un
chien, on veut encore exploiter la détresse
immense dans laquelle il se débat. Ils se fonde
des sociétés ayant pour but unique l’exploi
tation odieuse de ces malheureux, possible
grâce au cours de change qui fait que la
Couronne représente en Autriche une certaine
valeur, alors qu’à l’étranger elle oscille vers le
néant.
Hors, afin d’asseoir plus solidement le règne
de l’argent, afin de consolider le régime de
l’exploitation de l’homme par le scélérat, et
afin de prévenir que s’éveillent dans l’âme des
travailleurs conscients du monde entier les
sentiments d’intégrité et de solidarité qui y
sommeillent, on fait prudemment la conspi
ration du silence autour de ce qui te passe à
Vienne. Car l’éclatement du ressentiment d’un
peuple de travailleurs et d’opprimés peut-être
terrible : voyez la Russie. Sans doute, pareille
chose n’est pas à craindre en Autriche, où le
peuple déjà accablé par les souffrances et les
privations imposées par une longue guerre, se