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le but de la perfection. Tout ce qu’il peut atteindre, il le couvre de boue et de 
sang. Dans le monstrueux seul l’homme est créateur, les inaptes à cette besogne 
composent des vers, pincent la lyre ou brandissent le pinceau. Ce dernier 
groupe s’adonne avec une frénésie énigmatique à peindre des natures-mortes, 
des paysages, des nus. Depuis le temps des cavernes, l’homme peint des na 
tures-mortes, des paysages, des nus. Depuis le temps des cavernes l’homme se 
glorifie, se divinise et cause par sa monstrueuse vanité les catastrophes hu 
maines. L’art a collaboré à ce faux développement. Je trouve écoeurant cette 
conception d’art qui a soutenue la vanité de l’homme. 
L’homme aime ce qui est vain et mort 
Aussi dans l’art, l’homme aime ce qui est vain et mort. Il ne peut com 
prendre que la peinture soit autre chose qu’un paysage préparé à l’huile et 
au vinaigre et la sculpture une cuisse de femme fabriquée avec du marbre ou 
du bronze. Toute transformation vivante de l’art lui paraît aussi détestable 
que les métamorphoses éternelles de la vie. Les lignes droites et les couleurs 
franches l’exaspèrent surtout. L’homme ne désire pas aller au fond des choses. 
La clarté de l’univers fait trop ressortir sa déchéance et sa laideur. C’est pour 
quoi l’homme s’accroche désespérément à toute guirlande gracieuse et se 
fait spécialiste en valeurs. De ses neuf ouvertures encadrées de boucles, 
l’homme exhale de la vapeur bleue, du brouillard gris, de la fumée noire. Il 
tente parfois à se promener comme une mouche au plafond, mais échoue 
toujours, et tombe avec fracas sur sa table couverte de la plus belle vaisselle. 
L’homme appelle abstrait ce qui est concret. Ce n’est pas étonnant, car 
ordinairement il confond le devant et le derrière tout en se servant de son 
nez, de sa bouche et de ses oreilles, c’est à dire de cinq de ses neuf ouvertures. 
Je comprends qu’on nomme abstrait un tableau cubiste, car des parties ont 
été soustraites à l’objet qui a servi de modèle à ce tableau. Mais je trouve 
qu’un tableau ou une sculpture qui n’ont pas eu d’objet pour modèle, sont 
toute aussi concrets et sensuels qu’une feuille ou une pierre. 
L’art est un fruit 
L’art est un fruit qui pousse dans l’homme, comme un fruit sur une plante 
ou l’enfant dans le sein de sa mère. Mais, tandis que le fruit de la plante, le 
fruit de l’animal, le fruit dans le sein de sa mère, prend des formes autonomes
	        
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